Thursday, October 13, 2011

La Réunion : les fruits et légumes pays n’ont pas dit leur dernier mot


Ail, oignon, pommes de terre, carottes, agrumes... Les productions locales de ces fruits et légumes sont de plus en plus menacées par les importations. Ce n’est pourtant pas une fatalité pour la profession qui tente de s’organiser afin de récupérer des parts de marché dans les prochaines années.
Oignon d’Inde, ail de Chine, carotte d’Australie... C’est un véritable tour du monde auquel ont droit les consommateurs réunionnais au moment de faire leurs courses de fruits et légumes. D’année en année, les importations grignotent des parts de marché sur les productions locales. Au risque de finir par les éclipser.
Les importations de carottes et d’agrumes ont ainsi augmenté de 40% en 10 ans, passant de 1800 tonnes annuelles en 2000 à 2950 tonnes en 2010 pour les premières, et de 3999 à 6885 tonnes pour les seconds. Dans le même temps, la production locale de carottes a chuté de plus du tiers, de 2600 à 1890 tonnes. Les agriculteurs locaux ont aussi produit de moins en moins d’agrumes, de 11200 tonnes en 2000 à 9900 tonnes en 2010 (- 13%).
Ail, oignon, piments, poivrons... Le constat est à peu près le même pour la plupart des productions locales. Seules les salades, tomates et courgettes tirent à peu près leur épingle du jeu - peu ou pas d’importations et une production locale de plusieurs centaines ou milliers de tonnes. Quant aux fruits et légumes qui ne poussent pas ou peu sur les terres réunionnaises, ils font aussi l’objet d’importations en hausse, aux alentours de 20% sur dix ans pour les pommes, les poires et les pêches. Bref, dénicher des fruits et légumes locaux sur les étals relève de plus en plus du défi.
Pourtant, il pourrait en être autrement. « Il y a 40 ans, la Réunion était le grenier de l’ail dans l’océan Indien, rappelle Jean-Yves Minatchy, président de la chambre d’agriculture. Mais les importations nous ont assommés. La Réunion est devenue un marché déversoir. Certes, nous produisons les trois quarts de notre consommation de fruits et légumes frais. Mais nous faisons toujours venir trop de produits de l’extérieur. Car tout ce que nous importons aujourd’hui, nous pourrions très bien le produire localement. Comme peut-on importer 17 tonnes de salades, alors que nous avons les capacités d’en produire toute l’année ? Il faut stopper l’importation, dont le nid se creuse d’année en année. Les Réunionnais participent ainsi au développement économique de pays étrangers au lieu de soutenir celui de la Réunion. »
Au-delà des pertes engendrées pour l’économie locale, Jean-Yves Minatchy pointe un autre inconvénient majeur à l’ampleur grandissante des importations. « Localement, nous sommes tenus de respecter toutes les normes environnementales européennes, explique-t-il. Ce n’est pas le cas de l’Australie, par exemple, dont les carottes reçoivent 25 produits de traitement chimique contre cinq pour celles produites localement. Or, ces carottes utilisées pour nourrir le bétail en Australie, nous les donnons à manger à nos enfants dans les cantines des écoles ! Jusqu’à quand la Réunion va-t-elle servir de dépotoir ? » Jusqu’à ce que les filières locales réussissent à devenir plus compétitives, serait-on tenté de répondre. Car les coûts de production relativement élevés localement expliquent en grande partie la part prise par les importations.
Source: L'Express 12.10.11

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