De nouveaux parasites ont fait leur apparition dans l’île : trois types de cochenilles originaires d’Amérique centrale et d’Afrique qui font des ravages depuis le début de l’année.
«Sa manier pe ale la, enn pie papay pou nepli ena dan Albion. » Rishi, jardinierdans ce village de lacôte Ouest, ne croit pas sibien dire. Comme d’autreshabitants de cette localité,depuis le début de l’annéeil assiste, impuissant, à uneinfestation virulente de cochenillesqui a causé la destructiondes papayers. Elless’attaquent aussi aux frangipaniers,communémentappelés
gouleyti, aux arbresfruitiers et aux plants d’hibiscus,entre autres. L’infestationest d’autant plus favoriséepar les fortes pluies etles grosses températures quiprévalent actuellement.
Au 14 février, trois types de cochenilles ont été répertoriés sur le territoire par le service entomologique du ministère de l’Agro-industrie. Des échantillons ont été envoyés au
CABI GlobalPlant Clinic, un laboratoire britannique, pour les authentifier. De ce que l’on sait, le premier type, le
Phenacoccussolenopsis, est originaire d’Amérique centrale. Considéré comme une menace pour les plants de coton, il est présent à Maurice depuis janvier 2011.
Le second type, le
Paracoccus marginatus, égalementd’Amérique Centrale, a étésignalé à La Réunion. Aussiappelé cochenille farineuse,ce tueur d’hibiscus et de papayersa traversé le Mexique,les Antilles et la Floride, auxEtats-Unis, avant de fairedes ravages à l’île soeur, àl’Etang-Salé, en février 2010.La troisième espèce, le
Planococcus kenyae, nous vientd’Afrique. Découverte en1923 au Kenya, elle affectesurtout les plants de café. Elle attaque aussi les plantsornementaux et autres légumes.Toutefois, pour lesexperts du ministère del’Agro-industrie, c’est un« emerging pest » en Afriqueet sur lequel il existe peud’informations.
Un aspect « moisi »
D’Albion, ces cochenilles ont commencé à gagner d’autres régions de Maurice, selon l’Agricultural Research and Extension Unit (AREU). En passant par Petite-Rivière, Pointe-aux-Sables et Pailles, elles auraient déjà atteint le Nord. Par manque d’information, ces cochenilles sont actuellement prises pour le
white fly, soit le pou blanc. Ce qui résulte dans l’épandage d’insecticides qui n’ont toutefois pas l’effet escompté sur ces parasites. Or, pour endiguer l’épidémie, l’AREU recommande l’utilisation de l’
Actara, du
Confi dor et du
Karate, comme c’est le cas à la Pépinière de Gros-Cailloux, situé près d’Albion.
« L’attaque a été plus virulente en début d’année. On a dû couper nos papayers. A terme, cela va poser un vrai problème car ces insectes vont attaquer toutes les plantes », explique le
General Manager de la pépinière, ChristopherBlackburn.
La cochenille affecte une plante de manière suivante : elle suce la sève, laissant la plante exsangue. Ayant réduit la photosynthèse, elle favorise la propagation d’un virus qui donne à la plante un aspect noirâtre, comme si celle-ci était atteinte de moisissure. Cet effet est encore plus visible sur les frangipaniers, les premiers symptômes étant les feuilles atrophiées. La première chose à faire est alors d’enlever toutes les feuilles sur l’arbre et de les brûler.
D’autres espèces touchées
Dans le cas des hibiscus, les fleurs n’éclosent plus, les boutons ayant été dévorés par les cochenilles. Comme pour toute autre plante atteinte, il faut alors asperger le plant d’hibiscus avec une eau savonneuse ou de l’alcool, voire de l’huile, en guise de mesure préventive, l’ennemi naturel, la coccinelle, ne faisant visiblement pas le poids face à ces parasites venus d’ailleurs.
Une enquête a été ouverte pour déterminer comment ces parasites sont entrés sur le territoire. Tout porte cependant à croire qu’ils ont été introduits par l’importation de fruits, de légumes ou de plants ornementaux. La même explication est avancée concernant le
TomatoYellow Leaf Curl Virus qui touche la pomme d’amour depuis décembre 2011, surtout dans le Nord. Comme son nom l’indique, ce virus provoque le jaunissement des feuilles du plant. Les feuilles sont rabougries et des traces noirâtres autour d’un halo blanc sont visibles sur les fruits.
Afin d’éviter que cette maladie ne perdure, l’AREU procédera au traitement des graines de pomme d’amour à l’eau chaude avant de les remettre aux planteurs. Le « piment cari », également touché par un parasite, est introuvable sur le marché.
« Nepli pegagne », se désole Isoop Soobadar, président de la Market Traders Association.
A La Réunion, les études menées à l’Etang-Salé après la découverte du
Paracoccusmarginatus ont démontré que cette cochenille s’attaque également à l’ananas, l’aubergine, l’avocatier, la patate douce, le poivron et au maïs.
Source: lexpress.mu 03.04.13